Le Cadre Européen
Le Cadre Européen Commun de Référence pour les LanguesDictionnaireTâche 
Un Cadre de référence pour l’apprentissage, l’enseignement et l’évaluation des langues vivantes, transparent, cohérent et aussi exhaustif que possible, doit se situer par rapport à une représentation d’ensemble très générale de l’usage et de l’apprentissage des langues. La perspective privilégiée ici est, très généralement aussi, de type actionnel en ce qu’elle considère avant tout l’usager et l’apprenant d’une langue comme des acteurs sociaux ayant à accomplir des tâches (qui ne sont pas seulement langagières) dans des circonstances et un environnement donnés, à l’intérieur d’un domaine d’action particulier. Si les actes de parole se réalisent dans des activités langagières, celles-ci s’inscrivent elles-mêmes à l’intérieur d’actions en contexte social qui seules leur donnent leur pleine signification. Il y a « tâche » dans la mesure où l’action est le fait d’un (ou de plusieurs) sujet(s) qui y mobilise(nt) stratégiquement les compétences dont il(s) dispose(nt) en vue de parvenir à un résultat déterminé. La perspective actionnelle prend donc aussi en compte les ressources cognitives, affectives, volitives et l’ensemble des capacités que possède et met en oeuvre l’acteur social. (Chap 2 p 15)

[...] Les activités langagières impliquent l’exercice de la compétence à communiquer langagièrement, dans un domaine déterminé, pour traiter (recevoir et/ou produire) un ou des textes en vue de réaliser une tâche. (p. 15)

Description

Les tâches ou activités sont l’un des faits courants de la vie quotidienne dans les domaines personnel, public, éducationnel et professionnel. L’exécution d’une tâche par un individu suppose la mise en oeuvre stratégique de compétences données, afin de mener à bien un ensemble d’actions finalisées dans un certain domaine avec un but défini et un produit particulier (voir 4.1).

La nature des tâches peut être extrêmement variée et exiger plus ou moins d’activités langagières ; elles peuvent être créatives (la peinture, l’écriture créative), fondées sur des habiletés (le bricolage), de résolution de problèmes (puzzles, mots croisés), d’échanges courants mais aussi telles que l’interprétation d’un rôle dans une pièce, la participation à une discussion, la présentation d’un exposé, un projet, la lecture d’un message et les réponses à y apporter (courrier électronique par exemple), etc. Une tâche peut être tout à fait simple ou, au contraire, extrêmement complexe (par exemple l’étude d’un certain nombre de plans et d’instructions pour monter un appareil compliqué et inconnu). Le nombre d’étapes ou de tâches intermédiaires peut être plus ou moins grand et, en conséquence, la définition des limites d’une tâche donnée risque de s’avérer difficile.

La communication fait partie intégrante des tâches dans lesquelles les participants s’engagent en interaction, réception, production, compréhension ou médiation ou une combinaison de deux ou plus de ces activités comme, par exemple, l’interaction avec un service public et la réponse à un formulaire ou la lecture d’un rapport suivie d’une discussion avec des collègues pour parvenir à une décision sur un projet, ou le respect d’un mode d’emploi pour réaliser un assemblage et, dans le cas où il y a un observateur ou un assistant, le commentaire ou la demande d’aide sur la procédure, ou encore la préparation (à l’écrit) d’une conférence et la conférence, ou la traduction officieuse pour un visiteur, etc.
Des types de tâches ou activités similaires constituent l’unité centrale de nombreux programmes, manuels scolaires, expériences d’apprentissage en classe et de tests, encore que leur forme puisse être différente selon qu’il s’agit d’apprendre ou de tester. Ces tâches « cibles » ou de « répétition » ou « proches de la vie réelle » sont choisies en fonction des besoins de l’apprenant hors de la classe, que ce soit dans les domaines personnel ou public ou en relation à des besoins plus particulièrement professionnels ou éducationnels.
D’autres sortes de tâches ou activités, de nature plus spécifiquement « pédagogique », sont fondées sur la nature sociale et interactive « réelle » et le caractère immédiat de la situation de classe. Les apprenants s’y engagent dans un « faire-semblant accepté volontairement » pour jouer le jeu de l’utilisation de la langue cible dans des activités centrées sur l’accès au sens, au lieu de la langue maternelle à la fois plus simple et plus naturelle. Ces activités de type pédagogique sont assez éloignées de la vie réelle et des besoins des apprenants ; elles visent à développer une compétence communicative en se fondant sur ce que l’on sait ou croit savoir de l’apprentissage en général et de celui des langues en particulier. Les tâches pédagogiques communicatives (contrairement aux exercices formels hors contexte) visent à impliquer l’apprenant dans une communication réelle, ont un sens (pour l’apprenant), sont pertinentes (ici et maintenant dans la situation formelle d’apprentissage), exigeantes mais faisables (avec un réajustement de l’activité si nécessaire) et ont un résultat identifiable (ainsi que d’autres, moins évidents dans l’immédiat).

Les activités de ce type peuvent avoir pour complément des tâches intermédiaires « méta-communicatives » telles que les échanges autour de la mise en oeuvre de la tâche et la langue utilisée pour la mener à bien. Cela suppose que l’apprenant contribue à la sélection, à la gestion et à l’évaluation de l’activité ce qui, dans la situation d’apprentissage d’une langue, peut devenir partie intégrante des activités elles-mêmes. (Chap. 7 p. 121)
Plus généralement, la formulation des objectifs en termes de tâches a une vertu illustrative qui permet de concrétiser, pour l’apprenant même, les résultats attendus et qui peut jouer ainsi un rôle pour la motivation fonctionnelle à courte échéance, dans la durée d’un apprentissage. (exemple pour un enfant du primaire : jouer au jeu des 7 familles en LE) (P. 107)
Les utilisateurs du Cadre de référence envisageront et expliciteront selon le cas

– les principes de sélection et de poids relatif des tâches « authentiques » et « pédagogiques » pour atteindre leurs objectifs, y compris l’adéquation de différents types de tâches à des situations d’apprentissage données – les critères de sélection des tâches ciblées et significatives pour l’apprenant et qui proposent un but motivant mais atteignable, impliquant autant que possible l’apprenant et lui permettant des interprétations et des productions différentes

– la relation entre les activités portant essentiellement sur l’accès au sens et l’expérience d’apprentissage particulièrement centrée sur la forme, de sorte que l’attention de l’apprenant se centre régulièrement et utilement sur les deux aspects de manière équilibrée pour le développement de l’exactitude et de l’aisance

– des façons de prendre en compte le rôle central des stratégies de l’apprenant pour mettre en relation compétence et performances dans l’exécution réussie d’activités dans des conditions et sous des contraintes variables (voir Section 4.4)

– les moyens de facilitation d’une exécution réussie de la tâche et de l’apprentissage (y compris l’activation des compétences antérieures de l’apprenant dans une phase de préparation)
– les critères et les options appliqués pour sélectionner les tâches et, le cas échéant, modifier le niveau de difficulté d’une tâche en fonction des compétences différentes des apprenants et afin de tenir compte de leurs caractéristiques différentes (aptitudes, motivations, besoins, intérêts)

– dans quelle mesure la perception que l’on a de la difficulté ou de la facilité d’une tâche peut être prise en considération dans l’évaluation de la tâche accomplie et dans l’(auto)estimation de la compétence communicative de l’apprenant (voir notamment Chapitre 8, section 8.4).
Communication et apprentissage passent par la réalisation de tâches qui ne sont pas uniquement langagières même si elles impliquent des activités langagières et sollicitent la compétence à communiquer du sujet. Dans la mesure où ces tâches ne sont ni routinières ni automatisées, elles requièrent le recours à des stratégies de la part de l’acteur qui communique et apprend. Dans la mesure où leur accomplissement passe par des activités langagières, elles comportent le traitement (par la réception, la production, l’interaction, la médiation) de textes oraux ou écrits. [...] Dans la perspective retenue, stratégies de communication et stratégies d’apprentissage ne sont donc que des stratégies parmi d’autres, tout comme tâches communicationnelles et tâches d’apprentissage ne sont que des tâches parmi d’autres. De même, textes « authentiques » ou textes fabriqués à des fins pédagogiques, textes de manuels ou textes produits par les apprenants ne sont que des textes parmi d’autres.
Exécution de la tâche : conditions et contraintes

Outre les caractéristiques et les compétences de l’apprenant/utilisateur, la performance est affectée par certaines conditions et contraintes propres à la tâche et qui peuvent varier d’une activité à l’autre. L’enseignant ou l’auteur de méthode peut contrôler un certain nombre d’éléments afin d’augmenter ou de diminuer le niveau de difficulté d’une activité lors de son exécution.
Dans le cas d’activités de compréhension, on peut proposer un même texte à tout apprenant mais les produits seront différents au point de vue quantitatif (par exemple, la quantité d’information demandée) ou qualitatif (niveau de la performance attendue).
Dans d’autres cas, le texte support peut contenir une quantité d’informations ou se situer à des niveaux de complexité cognitive et/ou d’organisation différents ; ou encore un certain nombre de facilitateurs variés (images, mots-clés, déclencheurs, tableaux, schémas, etc.) peut être mis à disposition de l’apprenant. Le texte support peut être choisi pour sa pertinence à l’égard de l’apprenant (motivation) ou pour des raisons propres à l’apprenant. Un texte peut être écouté ou lu aussi souvent qu’il faut ou un nombre limité de fois. Le type de réponse attendu peut être très simple (Levez le doigt !) ou plus exigeant (Écrivez un nouveau
texte). Dans le cas d’activités d’interaction et de production, on peut jouer sur les conditions de la performance afin de rendre une tâche plus ou moins difficile, par exemple en faisant varier la durée de la préparation et de la réalisation, la durée de l’interaction ou de la production, le degré de prévisibilité, le nombre et la nature des supports non verbaux proposés, etc. (Chap. 7 p. 121)