Le Cadre Européen
Le Cadre Européen Commun de Référence pour les LanguesDictionnaireCompétence 
Générales individuelles

Les compétences générales individuelles du sujet apprenant ou communiquant (voir 5.1) reposent notamment sur les savoirs, savoir-faire et savoir-être qu’il possède, ainsi que sur ses savoir-apprendre.

Formes variées du développement des compétences générales
Le développement des compétences générales (voir Section 5.1) peut prendre des voies variées.
En ce qui concerne la connaissance du monde, l’apprentissage d’une nouvelle langue ne signifie pas que l’on part de rien. Une grande partie, si ce n’est l’essentiel de la connaissance dont on a besoin, peut être considérée comme allant de soi. Cependant, il ne s’agit pas seulement de mettre des mots nouveaux sur des idées anciennes, bien qu’il est remarquable que le cadre de notions générales et spécifiques proposées dans Threshold Level (et le Niveau seuil en français) se soit révélé largement approprié et adéquat pour une vingtaine de langues européennes appartenant à des familles linguistiques différentes. Il faut se faire une opinion pour se prononcer sur des questions telles que : la langue à enseigner ou à évaluer suppose-t-elle une connaissance du monde qui dépasse, en fait, le niveau de maturité de l’apprenant, ou est-elle extérieure à leur expérience d’adulte ? Si tel est le cas, cela ne va pas de soi. Il ne faut pas éluder la question ; dans le cas de l’utilisation d’une langue étrangère (non maternelle) comme langue d’enseignement à l’école ou à l’université (comme, en fait, dans l’enseignement de la langue maternelle), le contenu et la langue dans laquelle il est enseigné sont nouveaux tous les deux. Dans le passé, des manuels de langue comme ceux de l’éducateur tchèque renommé du XVIIe siècle, Comenius, ont tenté de structurer explicitement l’enseignement de la langue afin de donner aux jeunes gens une vue structurée du monde. (Chap 6 p. 114)


Définitions

La description englobe aussi le contexte culturel qui soutient la langue. Enfin, le Cadre de référence définit les niveaux de compétence qui permettent de mesurer le progrès de l’apprenant à chaque étape de l’apprentissage et à tout moment de la vie. (Chap. 1 p.9)

Les compétences sont l’ensemble des connaissances, des habiletés et des dispositions qui permettent d’agir.
Les compétences générales ne sont pas propres à la langue mais sont celles auxquelles on fait appel pour des activités de toutes sortes, y compris langagières. (p.15)

Complémentairement, dans toute intervention d’apprentissage et d’enseignement, il peut y avoir focalisation particulière quant à l’objectif et donc quant à l’évaluation, sur telle ou telle dimension ou tel sous-ensemble de dimensions (les autres dimensions étant alors considérées comme moyens par rapport aux objectifs, ou comme à privilégier à d’autres moments, ou comme non pertinentes en la circonstance). Apprenants, enseignants, responsables de programmes d’études, auteurs de supports pédagogiques et concepteurs de tests s’inscrivent nécessairement dans ce jeu entre focalisation sur une dimension, et degré et mode de prise en compte des autres. Des exemples illustreront plus loin cette assertion. Mais il est aisé de remarquer dès à présent que, si la visée souvent affichée (parce que la plus représentative d’une approche méthodologique ?) est le développement d’une compétence à communiquer, certains programmes d’enseignement/apprentissage visent de fait un développement qualitatif ou quantitatif des activités langagières en langue étrangère, d’autres insistent sur la performance dans un domaine particulier, d’autres encore sur l’épanouissement de certaines compétences générales individuelles, d’autres sur l’affinement de stratégies. Le constat que « tout se tient » n’interdit pas que les objectifs puissent être différenciés. (p. 16)

La compétence à communiquer langagièrement peut être considérée comme présentant plusieurs composantes une composante linguistique, une composante sociolinguistique, une composante pragmatique. Chacune de ces composantes est posée comme constituée notamment de savoirs, d’habiletés et de savoir-faire. (chap. 2 p 17)

Les compétences générales individuelles du sujet apprenant ou communiquant (voir 5.1) reposent notamment sur les savoirs, savoir-faire et savoir-être qu’il possède, ainsi que sur ses savoir-apprendre. (p. 16)
Classification

Le choix pour le Cadre d’une présentation taxinomique constitue à coup sûr une tentative pour traiter la grande complexité du langage humain en découpant la compétence langagière selon ses différentes composantes. Ceci nous renvoie à des problèmes psychologiques et pédagogiques d’importance. La communication met tout l’être humain en jeu. Les compétences isolées et classifiées ci-après se combinent de manière complexe pour faire de chaque individu un être unique. En tant qu’acteur social, chaque individu établit des relations avec un nombre toujours croissant de groupes sociaux qui se chevauchent et qui, tous ensemble, définissent une identité. (Chap. 1 p. 9)
La compétence linguistique est celle qui a trait aux savoirs et savoir-faire relatifs au lexique, à la phonétique, à la syntaxe et aux autres dimensions du système d’une langue, pris en tant que tel, indépendamment de la valeur sociolinguistique de ses variations et des fonctions pragmatiques de ses réalisations. Cette composante, considérée sous l’angle ici retenu de la compétence à communiquer langagièrement d’un acteur donné, a à voir non seulement avec l’étendue et la qualité des connaissances (par exemple en termes de distinctions phonétiques établies ou d’étendue et de précision du lexique), mais aussi avec l’organisation cognitive et le mode de stockage mémoriel de ces connaissances (par exemple les réseaux associatifs de divers ordres dans lesquels un élément lexical peut se trouver inclus pour ce locuteur) et avec leur accessibilité (activation, rappel et disponibilité). Les connaissances peuvent être conscientes et explicitables ou non (par exemple, là encore, quant à la maîtrise d’un système phonétique). Leur organisation et leur accessibilité varient d’un individu à l’autre et, pour un même individu, connaissent aussi des variations internes (par exemple, pour un individu plurilingue, selon les variétés entrant dans sa compétence plurilingue). On considérera aussi que l’organisation cognitive du lexique, le stockage de locutions, etc. dépendent, entre autres facteurs, des caractéristiques culturelles de la (ou des) communauté(s) où se sont opérés la socialisation de l’acteur et ses divers apprentissages. (Chap 2 p.17-18)

[...] à décomposer en
– compétence lexicale (5.2.1.1)
– compétence grammaticale (5.2.1.2)
– compétence sémantique (5.2.1.3)
– compétence phonologique (5.2.1.4)
Compétence orthographique (5.2.1.5)
- Compétence orthoépique ([...] les utilisateurs amenés à lire un texte préparé à haute voix, ou à utiliser dans un discours des mots rencontrés pour la première fois sous leur forme écrite, devront être capables de produire une prononciation correcte à partir de la forme écrite.)
– compétence orthographique (5.2.1.5). (p. 87)


La compétence sociolinguistique renvoie aux paramètres socioculturels de l’utilisation de la langue. Sensible aux normes sociales (règles d’adresse et de politesse, régulation des rapports entre générations, sexes, statuts, groupes sociaux, codification par le langage de nombre de rituels fondamentaux dans le fonctionnement d’une communauté), la composante sociolinguistique affecte fortement toute communication langagière entre représentants de cultures différentes, même si c’est souvent à l’insu des participants eux-mêmes. (Chap. 2 p. 18)

prendre en compte :
marqueurs des relations sociales (5.2.2.1)
– règles de politesse (5.2.2.2)
– expressions de la sagesse populaire (5.2.2.3)
– différences de registre (5.2.2.4)
– dialecte et accent (5.2.2.5). (p. 93)
La compétence pragmatique recouvre l’utilisation fonctionnelle des ressources de la langue (réalisation de fonctions langagières, d’actes de parole) en s’appuyant sur des scénarios ou des scripts d’échanges interactionnels. Elle renvoie également à la maîtrise du discours, à sa cohésion et à sa cohérence, au repérage des types et genres textuels, des effets d’ironie, de parodie. Plus encore pour cette composante que pour la composante linguistique, il n’est guère besoin d’insister sur les incidences fortes des interactions et des environnements culturels dans lesquels s’inscrit la construction de telles capacités. (Chap . 2 p 18)

La compétence discursive = la connaissance de l’organisation des phrases et de leurs composantes

la capacité à les maîtriser en termes
– de thème/rhème
– d’information donnée/information nouvelle
– d’enchaînement « naturel » (par exemple, temporel : Il est tombé (et) je l’ai frappé. – Je l’ai frappé (et) il est tombé.)
de cause/conséquence (par exemple, Les prix montent ; les gens réclament une augmentation de salaire.)

la capacité de gérer et de structurer le discours en termes
– d’organisation thématique
– de cohérence et de cohésion
– d’organisation logique
– de style et de registre
– d’efficacité rhétorique
– de principe coopératif (maximes conversationnelles de Grice, 1975)
« faites en sorte que votre contribution corresponde à ce qui est exigé, au niveau où elle a lieu, par la finalité ou le sens acceptés de l’échange conversationnel dans lequel vous êtes engagé(s), en observant les principes suivants :
– la qualité (essayez de rendre votre contribution véridique) ;
– la quantité (rendez votre contribution aussi informative que possible mais pas plus) ;
– la pertinence (ne dites que ce qui est approprié) ;
– la modalité (soyez bref et précis ; évitez l’obscurité et l’ambiguïté). »
La dérogation à ces critères en vue d’une communication directe et efficace ne devrait se faire que dans un but précis et non par incapacité à les respecter.

la capacité à structurer ; le plan du texte [...](p. 96)
oralement :
– souplesse
– tours de parole
– développement thématique
– cohérence et cohésion.
Compétence Culturelle : En ce qui concerne le développement du savoir socioculturel et des habiletés interculturelles, la position est quelque peu différente. À certains égards, les peuples d’Europe semblent partager une culture commune. À d’autres, il y a une diversité considérable, non seulement d’un pays à un autre mais également entre les régions, les classes, les communautés ethniques, les genres, etc. Il faut examiner avec précaution la représentation de la culture cible et le choix du ou des groupes sociaux sur lesquels on se focalise. Y a-t-il la moindre place pour les stéréotypes pittoresques, généralement archaïques et folkloriques semblables à ceux que l’on trouve dans les livres illustrés pour enfants (les sabots et les moulins en Hollande, les chaumières anglaises au seuil fleuri de roses) ? Ils captent l’imagination et peuvent s’avérer motivants notamment pour les plus jeunes enfants. Ils correspondent souvent, d’une façon ou d’une autre, à l’image que le pays en question se donne de lui-même, et on les protège et les promeut dans des festivals. S’il en est ainsi, on peut les présenter sous cet éclairage. Ils n’ont pas grand-chose à voir avec la vie quotidienne de la majorité de la population. Il faut trouver un équilibre à la lumière du but éducatif qui est de développer la compétence pluriculturelle des apprenants. (Chap 6 p 113)
Les savoirs, ou connaissance déclarative (voir 5.1.1) sont à entendre comme des connaissances résultant de l’expérience sociale (savoirs empiriques) ou d’un apprentissage plus formel (savoirs académiques). Toute communication humaine repose sur une connaissance partagée du monde. En relation à l’apprentissage et à l’usage des langues, les savoirs qui interviennent ne sont pas, bien entendu, seulement ceux qui ont à voir directement avec les langues et cultures. Les connaissances académiques d’un domaine éducationnel, scientifique ou technique, les connaissances académiques ou empiriques d’un domaine professionnel sont évidemment d’importance dans la réception et la compréhension de textes en langue étrangère relevant des domaines en question. Mais les connaissances empiriques relatives à la vie quotidienne (organisation de la journée, déroulement des repas, modes de transport, de communication et d’information), aux domaines public ou personnel, sont tout aussi fondamentales pour la gestion d’activités langagières en langue étrangère. La connaissance des valeurs et des croyances partagées de certains groupes sociaux dans d’autres régions ou d’autres pays telles que les croyances religieuses, les tabous, une histoire commune, etc., sont essentielles à la communication interculturelle. Les multiples domaines du savoir varient d’un individu à l’autre. Ils peuvent être propres à une culture donnée ; ils renvoient néanmoins à des constantes universelles. Si l’on admet que toute connaissance nouvelle ne vient pas seulement s’adjoindre à des connaissances préexistantes mais,
d’une part, dépend pour son intégration de la nature, de la richesse et de la structuration de ces dernières et, d’autre part, contribue comme en retour à les modifier et à les restructurer, ne serait-ce que localement, alors il va de soi que les savoirs dont dispose l’individu intéressent directement l’apprentissage d’une langue. Dans de nombreux cas, les méthodes d’enseignement et d’apprentissage présupposent que cette connaissance du monde existe. Toutefois, dans certains contextes (expériences d’immersion, scolarisation ou poursuite d’études universitaires en langue autre que maternelle), il y a enrichissement simultané et articulé de connaissances linguistiques et de connaissances autres. Les relations entre savoirs et compétence à communiquer demandent qu’on les considère attentivement. (p. 16)
Les habiletés et savoir-faire (voir 5.1.2), qu’il s’agisse de conduire une voiture, jouer du violon ou présider une réunion, relèvent de la maîtrise procédurale plus que de la connaissance déclarative, mais cette maîtrise a pu nécessiter, dans l’apprentissage préalable, la mise en place de savoirs ensuite « oubliables » et s’accompagne de formes de savoir-être, tels que détente ou tension dans l’exécution.
Ainsi, pour s’en tenir au cas de la conduite automobile ce qui est devenu, par l’accoutumance et l’expérience, un enchaînement quasi automatique de procédures (débrayer, passer les vitesses, etc.) a demandé à l’origine, une décomposition explicite d’opérations conscientes et verbalisables (Vous relâchez doucement la pédale d’embrayage, vous passez en troisième…) et la mise en place initiale de savoirs (il y a trois pédales dans une voiture non automatique, qui se situent les unes par rapport aux autres de telle manière, etc.) auxquels il n’est plus besoin de faire appel consciemment en tant que tels lorsque l’on « sait conduire ». Pendant l’apprentissage de la conduite, une attention forte a généralement été requise, une conscience de soi et de son corps d’autant plus vive que l’image de soi (risque d’échec, de raté, de manifestation d’incompétence) se trouve particulièrement exposée. Une fois la maîtrise atteinte, on attendra du conducteur ou de la conductrice une manière d’être marquant l’aisance et la confiance en soi, sauf à inquiéter les passagers ou les autres automobilistes. Il est clair que l’analogie avec certaines dimensions de l’apprentissage d’une langue pourrait ici être facilement établie (par exemple, la prononciation ou certaines parties de la grammaire telle que la conjugaison des verbes). (p.16)
Les savoir-être (voir 5.1.3), sont à considérer comme des dispositions individuelles, des traits de personnalité, des dispositifs d’attitudes, qui touchent, par exemple, à l’image de soi et des autres, au caractère introverti ou extraverti manifesté dans l’interaction sociale. On ne pose pas ces savoir-être comme des attributs permanents d’une personne et ils sont sujets à des variations. Y sont inclus les facteurs provenant de différentes sortes d’acculturation et ils peuvent se modifier.
Il est à noter que ces traits de personnalité, ces manières d’être, ces dispositions, se trouvent souvent pris en compte dans les considérations relatives à l’apprentissage et à l’enseignement des langues. C’est en cela aussi que, même si ils constituent un ensemble difficile à cerner et à désigner, ils doivent trouver leur place dans un Cadre de référence. D’autant plus si on les catégorise comme relevant des compétences générales individuelles et donc comme, d’une part, constitutifs aussi des capacités de l’acteur social et comme, d’autre part, acquérables ou modifiables dans l’usage et l’apprentissage mêmes (par exemple, d’une ou de plusieurs langues), la formation à ces manières d’être peut devenir un objectif. Comme le constat en est fréquent, les savoir-être se trouvent culturellement inscrits et constituent dès lors des lieux sensibles pour les perceptions et les relations entre cultures : telle manière d’être que tel membre d’une culture donnée adopte comme propre à exprimer chaleur cordiale et intérêt pour l’autre peut être reçue par tel membre d’une autre culture comme marque d’agressivité ou de vulgarité (p. 16)
Les savoir-apprendre (voir 5.1.4) mobilisent tout à la fois des savoir-être, des savoirs et des savoir-faire et s’appuient sur des compétences de différents types. En la circonstance, « savoir-apprendre » peut aussi être paraphrasé comme « savoir/être disposé à découvrir l’autre », que cet autre soit une autre langue, une autre culture, d’autres personnes ou des connaissances nouvelles.

Si la notion de « savoir apprendre » est valable dans tous les domaines, elle trouve un écho particulier à propos de l’apprentissage des langues. Selon les apprenants, savoir apprendre renvoie à des combinaisons différentes à différents degrés de certains aspects du savoir-être, du savoir-faire et du savoir. Savoir apprendre se combine à

savoir-être : par exemple une disposition à prendre des initiatives, voire des risques dans la communication en face à face, de manière à se donner des occasions de prise de parole, à provoquer une aide éventuelle de l’interlocuteur, à demander à ce dernier des reformulations facilitantes, etc. ; par exemple aussi des qualités d’écoute, d’attention à ce que dit l’autre, de conscience éveillée aux possibilités de malentendu culturel dans la relation avec l’autre

savoir : par exemple savoir quels types de relations morpho-syntaxiques correspondent à des variations de déclinaisons pour telle langue à cas ; autre exemple : savoir que les pratiques alimentaires et amoureuses peuvent comporter des tabous ou des rituels particuliers variables suivant les cultures ou marqués par la religion – savoir-faire : par exemple, se repérer rapidement dans un dictionnaire ou dans un centre documentaire ; savoir manipuler des supports audiovisuels ou informatiques offrant des ressources pour l’apprentissage.

Suivant les apprenants, les savoir-apprendre peuvent présenter des compositions et des pondérations variables entre savoir-être, savoirs et savoir-faire ainsi que la capacité à gérer l’inconnu.

Savoir apprendre peut présenter des pondérations en fonction de

variations suivant les objets : selon qu’il a affaire à de nouvelles personnes, à un secteur de connaissance vierge pour lui, à une culture très peu familière, à une langue étrangère

variations suivant les projets : face à un même objet (par exemple, les rapports parents/enfants dans une communauté donnée), les procédures de découverte, de recherche de sens ne seront sans doute pas les mêmes pour un ethnologue, un touriste, un missionnaire, un journaliste, un éducateur, un médecin, intervenant chacun dans leur perspective propre

variations suivant les moments et l’expérience antérieure : les savoir-apprendre mis en oeuvre pour une cinquième langue étrangère ont quelque chance d’être différents de ceux qui avaient été mis en oeuvre pour une première langue étrangère. (p. 17)
Niveaux de compétence

En examinant la dimension verticale du Cadre de référence, il ne faut pas oublier que le processus d’apprentissage d’une langue est continu et individuel. Il n’y a pas deux usagers d’une langue, qu’ils soient locuteurs natifs ou apprenants étrangers, qui aient exactement les mêmes compétences ou qui les développent de la même façon. Toute tentative pour définir des « niveaux » de compétence est arbitraire, dans une large mesure, comme elle le serait dans tout autre domaine de savoir ou de savoir-faire. Toutefois, il est utile, pour des raisons pratiques, de mettre en place une échelle de niveaux afin de segmenter le processus d’apprentissage en vue de l’élaboration de programmes, de rédaction d’examens, etc. Leur nombre et le niveau qu’ils atteignent dépendront largement de l’organisation particulière de tel ou tel système éducatif et de l’objectif qui a présidé à leur élaboration. (p. 20)
Propositions pédagogiques pour le développement de compétences linguistiques
  • Comment peut-on faciliter au mieux le développement des compétences linguistiques de l’apprenant en ce qui concerne le vocabulaire, la grammaire, la prononciation et l’orthographe ?
  • Jusqu’où peut-on attendre ou exiger des apprenants qu’ils développent leur vocabulaire ?
a. par la simple exposition à des mots et des locutions figées utilisés dans des textes authentiques oraux ou écrits
b. par la déduction de l’apprenant ou l’utilisation d’un dictionnaire consulté selon les besoins au cours des tâches et des activités
c. par la présentation des mots en contexte, par exemple dans les textes des manuels scolaires et l’utilisation qui s’en suit dans des exercices, des activités d’exploitation, etc.
d. par leur présentation accompagnée d’aides visuelles (images, gestes et mimiques, actions correspondantes, objets divers, etc.)
e. par la mémorisation de listes de mots, etc. avec leur traduction
f. par l’exploration de champs sémantiques et lexicaux
g. par l’entraînement à l’utilisation de dictionnaires unilingues et bilingues, de glossaires et thesaurus et tout autre ouvrage de référence
h. par l’explication du fonctionnement de la structure lexicale et l’application qui en résulte (par exemple, dérivation, suffixation, synonymie, antonymie, mots composés, collocations, idiomes, etc.)
i. par une étude plus ou moins systématique de la distribution différente des éléments lexicaux en L1 et L2 (sémantique contrastive).

Le choix du vocabulaire

Les concepteurs d’examens et de matériel pédagogique sont tenus de choisir le vocabulaire qu’ils y feront entrer. Les concepteurs de programmes et de référentiels ne sont pas obligés de le faire mais peuvent souhaiter donner des lignes directrices dans l’intérêt de la transparence et de la cohérence des instructions officielles. Il y a un certain nombre d’options.
Choisir des mots et des expressions clés a. dans les domaines thématiques exigés pour réaliser les tâches communicatives correspondant aux besoins des apprenants, b. qui concrétisent la différence culturelle et/ou les valeurs et croyances significatives partagées par le ou les groupes sociaux dont on étudie la langue.
– Suivre les principes de statistiques lexicales en sélectionnant les mots à grande fréquence dans un large corpus ou dans des domaines thématiques réduits.
– Sélectionner des textes (authentiques) oraux et écrits et apprendre/enseigner sans restrictions les mots qu’ils contiennent.
Ne pas planifier l’enrichissement du vocabulaire mais lui permettre de se développer organiquement en quelque sorte en réponse à la demande de l’apprenant lorsqu’il entreprend des tâches communicatives. (Chap. 6 p 114)

Grammaire exercices

On peut attendre ou exiger des apprenants qu’ils développent leur compétence grammaticale
a. de manière inductive par l’exposition à de nouvelles données grammaticales telles qu’elles apparaissent dans des documents authentiques
b. de manière inductive en faisant entrer de nouveaux éléments grammaticaux, des catégories, des structures, des règles, etc.
dans des textes produits spécialement pour montrer leur forme, leur fonction et leur sens
c. comme dans b. mais suivis d’explications et d’exercices formels
d. par la présentation de paradigmes formels, de tableaux structuraux, etc. suivis d’explications métalinguistiques appropriées en L2 ou en L1 et d’exercices formels
e. par la clarification et, le cas échéant, la reformulation des hypothèses des apprenants, etc.

Si l’on utilise des exercices formels, ils peuvent appartenir aux types suivants

a. textes lacunaires
b. construction de phrases sur un modèle donné
c. choix multiples
d. exercices de substitution dans une catégorie (par exemple, singulier/pluriel, présent/passé, actif/passif, etc.)
e. combinaison de phrases (par exemple, relatives, propositions adverbiales et nominales, etc.)
f. traduction de phrases de la L1 vers la L2
g. questions/réponses entraînant l’utilisation de certaines structures
h. exercices de développement de l’aisance langagière centrés sur la grammaire, etc. (Chap 6  p. 114)
Le développement des compétences pragmatiques (voir 5.2.3) de l’apprenant peut-il être

a. considéré comme transférable de l’éducation et de l’expérience en général dans la langue maternelle (L1) ?
ou facilité
b. en augmentant progressivement la difficulté de la structure du discours et l’étendue fonctionnelle des textes présentés aux apprenants ?
c. en exigeant de l’apprenant qu’il produise des textes de complexité croissante ou en traduisant de la L1 à la L2 des textes de complexité croissante ?
d. en mettant en place des tâches qui exigent une étendue fonctionnelle de plus en plus large et l’adhésion aux modèles de l’échange verbal ?
e. par un travail sur la prise de conscience (analyse, explication, terminologie, etc.) qui s’ajoute aux activités pratiques ?
f. par un enseignement explicite et l’exercice des fonctions, des modèles de l’échange verbal et de la structure du discours ?
En conséquence, comment doit-on traiter les compétences non spécifiquement langagières dans un cours de langue ?

a. en considérant qu’elles existent déjà ou qu’elles ont été mises en place ailleurs (par exemple dans d’autres disciplines enseignées en L1) de manière suffisante pour qu’on les considère comme acquises en L2
b. en les traitant au coup par coup quand la question surgit
c. en sélectionnant ou en produisant des textes qui illustrent de nouveaux points et de nouveaux domaines de connaissance
d. par des cours ou des manuels qui traitent des domaines particuliers (Landeskunde, civilisation, etc.) en L1 et en L2
e. par une composante inter culturelle conçue pour provoquer la prise de conscience de la partie pertinente du background respectif de l’apprenant et du locuteur natif en termes socioculturels, d’expérience et de processus cognitifs
f. par des jeux de rôle et des simulations
g. par l’utilisation de la L2 comme langue d’enseignement d’autres disciplines
h. par le contact direct avec des locuteurs natifs et des textes authentiques. (Chap 6 p. 113)
Peut-on considérer que le développement de la compétence sociolinguistique de l’apprenant (voir 5.2.2) est transférable de l’expérience qu’a l’apprenant de la vie sociale ou facilité ...

a. par l’exposition à une langue authentique utilisée de manière appropriée dans son cadre social ?
b. par la sélection ou la production de textes qui exemplifient les contrastes sociolinguistiques entre la société d’origine et celle de la langue cible ?
c. en attirant l’attention sur les contrastes sociolinguistiques lorsqu’ils apparaissent, en les expliquant et en les discutant ?
d. en attendant que des erreurs soient commises et en les faisant alors remarquer pour les analyser, les expliquer et indiquer l’usage correct ?
e. comme une partie de l’enseignement explicite d’une composante socioculturelle dans l’étude d’une langue vivante ?